VII
LES TAPISSIERS.
1519-1646.
Qu'il ait existé des fabricants de haute lisse à.Paris pendant le règne de François Ier, c'est un fait acquis. Sans doute les désastres de la guerre de Cent Ans avaient porté un coup presque mortel à tous les métiers parisiens, et surtout aux industries somptuaires; toutefois, comme nous avons essayé de le démontrer jadis(1), les successeurs de Nicolas Bataille, le glorieux tapissier de Charles V, n'avaient jamais complètement cessé leurs travaux. Ils végétaient, il est vrai, assez misérablement; la clientèle était rare, la réputation et l'activité des ateliers flamands attiraient les plus grosses commandes du roi deFrance. Néanmoins, on sait pertinemment que François Ier ne cessa d'encourager les travailleurs régnicoles. Nous avons signalé naguère les deux marchands parisiens, — étaient-ils fabricants ou seulement intermédiaires? — qui fournissaient en 1528 trois tentures destinées à Renée de France lors de son départ pour les états de Ferrare, dont elle épousait le souverain. Jacques Pinel et Claude Bre- . das, ainsi s'appelaient ces Parisiens, avaient reçu pour prix de leur ouvrage la somme de 3,6oo livres. L'ensemble ne comptait pas moins de vingt-sept panneaux : six formant une suite de Diverses fortunes ; douze verdures et neuf pièces de l'histoire de Hero et Léandre. Peut-être quelques débris de ces sujets existent-ils encore quelque part en Italie, On rencontre encore, vers la même époque, certains noms qu'on retrouvera dans les documents qui suivent/C'est Nicolas et Pasquier de Mortagne, à qui le Roi demande une tenture tissée d'or et de soie, preuve certaine de l'habileté et de la renommée de ces artisans. Un autre Parisien, Pierre du Larry, s'engage envers l'archevêque de Sens, Louis de Bourbon, à tisser pour l'abbaye de Saint-Denis six tapisseries de la Vie de Jésus-Christ, au prix de 110 sous tournois l'aune. Pierre de Larry va reparaître dans de nombreux marchés de i547 à i568. Il a pour successeur son fils Antoine, qui travaille encore en 1586. Enfin, un certain Bernard Lecourt reçoit divers payements de Louise de Savoie pour réparation de tentures en mauvais état. Ce Lecourt serait donc peut­être un rentraiteur, sinon un haut lisseur; mais on sait que les deux métiers se confondent souvent.                                                                                       '
A François Ier remonte l'origine de la première manufacture royale de tapisseries installée dans un des palais du souverain et ne travaillant que pour lui. Les analyses des comptes royaux du xvi0 siècle, faites pour André Félibien, ont sauvé de l'oubli les noms d'un certain nombre de ces ancêtres de nos artistes des Gobelins. Tandis que les peintres Claude Badouyn, Lucas Romain, Charles Carmoy, François Cachenemis, Jean-Baptiste Baignequeval, d'autres encore, reçoivent des émoluments fixes pour «vacquer aux patrons de tapisserie que le Roi fait faire audit Fontainebleau", concurremment avec d'autres travaux de.leur métier, en même
'i' Voir Histoire de la tapisserie depuis le Moyen Age jusqu'à nos jours, Mame, in-8°, 1886, p. 222-225.
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